L’amour, l’amitié, la haine. Par où commencer ? Probablement par le début : l’amour parental. Deux jeunes mariés, heureux de voir le fruit de leur amour prendre forme et grandir. Le bonheur de savoir qu’un petit bout allait naître et qu’il pourrait le gâter comme aucun parents ne seraient capable de le faire. Un petit mec. Voilà qui enchantait un peu plus le père. Il savait qu’il pourrait lui apprendre à jouer au foot et l’emmener avec lui aux stades. Ou encore qu’il se tournerait souvent vers lui pour les problèmes de filles. L’enchantement pris fin à l’accouchement. Enfin à la fin de l’accouchement. Ou plutôt lorsque le petit gars fut sorti et que les médecins demandèrent à la femme de continuer à pousser. Les échographies avaient été trompeuses. Des jumeaux, elle n’a montré que l’un des deux. Celui en meilleure santé à la naissance. Sa petite sœur n’était pas au programme et n’aurait sûrement pas dû survivre, le cordon ombilical, bien trop serré autour du cou. Elle a apporté les petits problèmes, avant les grandes joies aux parents. Contrairement au seul enfant prévu. L’avantage au moins fut qu’ils eurent le temps de tout acheter pour une petite fille. Des vêtements moins bleu et moins… Masculin. Et surtout un second berceau et une seconde poussette. Mais si les premiers mois n’ont pas rimé avec bonheur, les parents ne pouvait prévoir une meilleur entende entre leur enfant. A ce qui parait, les jumeaux sont souvent proches, voir fusionnels. Et ce fut le cas dès leur plus tendre enfance. Il est arrivé à plusieurs reprise que les deux fassent tourner leur parent en bourrique jusqu’à tenter de se faire confondre l’un avec l’autre. Et comparé à un gosse de six ans, le coiffeur est un artiste de renom. Car oui, ils ont tenté à plusieurs reprises de se couper les cheveux de la même manière et d’échanger leur vêtement, jouant au roi du silence pour ne pas se faire repérer. Une méthode loin de paraitre suspecte, en sachant qu’il n’était pas rare de les entendre se taire pour les voir communiquer par des gestes. Et c’est à force de jeu à deux, de sortie en famille et de langage codé qu’ils finirent par passé tout leur temps ensemble. La petite plus attaché que la fierté du papa, s’accrochait souvent à lui quand il allait voir trop loin. Prétextant un bobo ou une découverte extraordinaire pour qu’il s’intéresse plus à elle qu’aux autres. Son frère était à elle, pas à la première personne qui passerait pour le blesser. Et puis, ils étaient bien à deux, il n’avait pas besoin de quelqu’un d’autre. A deux, il pouvait tout faire.
Seulement ça, ce n’était que le point de vu de Roxanne. Zack voyait les choses différement. Il était plus sociable comme garçon. Et il courrait déjà à la rencontre des autres enfants. Des deux, c’est lui qui était le plus à même de blesser l’autre en s’éloignant. Il ne s’est pas gêné d’ailleurs. Dès que l’occasion s’est présentée de parler à la nouvelle voisine, il l’a saisi à deux mains. Il s’est rapproché de la gamine de 10 ans, le même âge qu’eux exactement, et l’a abandonnée à son sort. La plus grande des tragédies, même s’il ne l’a pas vraiment abandonné. Il a juste donné autant d’attention à une autre que ce qu’il lui offrait à elle. Evelyn, ça ressemble au nom d’une poudre à lessiver bon marché, pas à un prénom. Elle ne s’est pas gênée pour le faire remarquer à la principale intéressée d’ailleurs, en espérant qu’à force de lui sortir tout ce qui lui passait par la tête, elle les laisserait tranquille. Mais non ! C’était pire, son frère restait, un peu plus avec sa poudre à lessiver, en lui disant que ce n’était que des mensonges. Roxanne a d’ailleurs tenté plus d’une fois de les éloigner. Et il lui a répondu d’aller voir ailleurs s’il y était. Ce fut la première fois où elle s’est senti en concurrence avec une autre et où il l’a fait pleurer. Elle était en danger et elle a réagi rapidement de la première manière qui lui est venu à l’esprit : faire les quatre-cent coups toutes seul. De plus en plus dangereux avec l’âge. Zack encaissait, sans rien lui dire, si ce n’est de faire attention et d’arrêter de risquer sa vie. Mais il ne lui a jamais crié dessus ou qualifié ces gestes de conneries. Jusqu’à ce qu’elle se sentit exclu d’une conversation pendant de trop longue minute à l’âge de 13 ans. Ça tombait bien, ils passaient sur un pont. Elle a grimpé sur l’un des rebords pour marcher en équilibre sur le bout comme un trapéziste risquant sa vie car ici, il n’y avait rien pour la rattraper.
« Hé, Zack, t’as vu je peux marcher sans tomber ! J’ai même pas besoin des mains pour tenir en équilibre ! » C’est vite dis. Son pied dérape et son poids commence à pencher du côté du vide. Ses bras balancent pour essayer de tomber du bon côté. Heureusement son jumeau l’a saisit, c’était moins une. Mais peut-être que ce n’était pas une si bonne chose. Pour la première fois, il l’a engueulée comme du poisson pourri, en lui crachant toute la vérité à la figure, devant Evelyn. Il ne s’est même pas soucier des larmes qui lui montaient aux yeux. Mais une fois qu’il eut fini, c’est elle qui s’en prit à la copine de son frère.
« Tout ça, c’est ta faute ! T’as gagné ! Je te le laisse, je m’en fous ! J’ai plus de frère maintenant ! » Son poing s’est abattu contre l’épaule de sa concurrente avec une tel force que seul les vêtements chiffonnés peuvent prouver qu’elle a frappé. Elle n’est pas restée pour attendre la réponse, elle a fui. Ses jambes la ramenant plus rapidement que prévu à la maison, alors que ses yeux ont continué à s’humidifier.
L’amitié
Elle n’a pas eu d’autre choix que de se résoudre à l’idée de partager son Zack avec Evelyne. Ce n’est plus son jumeau, c’est juste son frère. La fusion, il la partage avec la brune. Elle n’est plus bonne à rien, juste à faire bouche trou à la maison. Et encore ! Parfois, elle a l’impression que ce n’est pas le cas et qu’il a juste envie d’aller voir ailleurs. Et vu que les bêtises n’ont pas marchés. Elle cherche un autre moyen de se venger. Elle commence à se lier d’amitié avec des gens de sa classe. Elle ne fréquente plus les mêmes personnes. Si son frère les voit, c’est qu’ils ne sont pas bien. En plus, elle crée la surprise à la maison lorsqu’elle se risque à demander de ne plus fréquenter les mêmes clubs de sport. A peu près autant que la première fois où Zack a refusé de sortir en famille pour rester à la maison. Roxanne ne s’est pas dérangé de dire ce qu’elle pensait d’Evelyne pour qui il restait probablement. Elle s’est ramassé une jolie gifle, ce jour-là. Elle n’a même pas réagit, trop choquée. Il défendait sa pute tatouée au lieu de prendre soin de sa sœur. Il la blessait toujours un peu plus. Il lui aurait suffi de lui planter un couteau dans le bras pour la faire souffrir à ce point au lieu de se montrer si patient dans la destruction. Mais Evelyn aussi fait partie du plan. Elle a achevé en toute beauté leur relation en venant squatter leur appartement. Roxanne n’a pas chercher à comprendre la raison et elle a cru la trouver la nuit où après avoir fait un cauchemar, elle s’est rendu dans la chambre de son frère. Elle n’est pas restée longtemps. La porte a vite eu fait de se refermer sur les corps entremêlés de Zack et de sa concurrente. Un vague sentiment de dégoût que son frère a dû remarquer lorsqu’il l’a aperçu. Quant à l’autre, elle a dû facilement le comprendre le lendemain matin avec de rares regards meurtriers mais les seuls qu’elle a reçu. Elle n’avait qu’une envie : la tuer sur place. Mais Evelyn, c’était la seule fille avec laquelle les questions liés à l’âge n’étaient pas aussi gênante que si elles auraient été posées à sa mère. Sa petite voix fluette et intimidé s’est fait entendre pour la première fois à 17 ans. Un garçon qui faisait battre son cœur plus fort que les autres. Et il y avait un trop plein de question. « Comment on sait si c’est le bon ? Tu l’a su comment avec Zack ? » , « C’est obligatoirement un coup de foudre ? », « On fait comment pour vérifier ? T’as que leur cœur qui bat et qui te le prouve ? », « C’est comment la première fois ?...Ca fait…mal ? », « C’est quand ? Le bon moment…. », « Et si… On oublie la capote ? Ça t’es déjà arrivé ? » Pas toutes posées à la fois heureusement. Petit à petit, dès moins gênantes aux plus personnelles. Elle a fini par livrer quelques détails dont elle n’a parlé à personne. Elle s’est doucement rapprochée d’elle, parlant d’autres choses que des garçons. Roxanne n’est pas devenue la meilleure amie du monde avec Evelyn mais elle ne la traitait plus comme une totale étrangère, un peu salope sur les bords.
Mais 17 ans, ce fut l’année des petits copains, et surtout de la fusillade au lycée. Enfin fusillade, c’est ce que tout le monde a raconté. Pour sa part, elle a juste senti l’odeur de brûler. Enfermer au toilette avec Jesse. Son coup de cœur de qui elle avait parlé à Evelyn. Les conseils de cette dernière ayant été efficaces. Même plus que cela, ils ont dû stopper en pleine action lorsque les flammes se sont rapprochées de leur cocon. Un cercueil idiot pour mourir brûlés-vifs à deux. Il y avait heureusement, une fenêtre assez grande pour laisser passer une personne malgré sa hauteur. Roxanne a mis plusieurs longues minutes à arriver à se hisser par la sortie. De trop longues minutes pour que Jesse arrive à en sortir rapidement et intact. Le feu lui a lécher les jambes d’assez près et assez longtemps pour qu’il en perde l’usage, bien trop brûlés. Elle ne sait pas ce qui en est advenu d’Evelyn et de Zack pendant ces trop longues minutes, tout ce qu’elle sait, c’est qu’elle ne peut pas oublier les cris de Jesse et qu’elle ne pourra probablement jamais le faire. C’est sûrement le souvenir de lui qu’elle ne pourra jamais oublier. Il ne lui reste plus que des souvenirs d’ailleurs. Il s’est donné la mort deux mois après. Et pourtant elle pensait que ça n’arriverait pas si elle restait à ses côtés. Le premier amour, le plus important, celui qu’on n’oublie pas et pour qui on est prêt à tout, c’était lui. Elle s’est replié sur elle-même envoyant valser Evelyn ailleurs, tandis qu’elle reprenait un peu plus les bras de son frère pour oublier. Abandonner les souvenirs du cœur qui bat et de toutes les folies imaginables. Dont la principale n’était pas prévue. Un début de vie dans son ventre. Elle ne l’a dit à personne. Et ne l’a pas laissé deviner. Ils s’étaient protégés mais dans la rapidité des événements, il y a dû avoir un imprévu dont elle s’est rendu compte trop tard. Plus moyen d’avorté. Et pas de début de ventre rond, de par le déni de grossesse. Pas de quoi inquiéter la famille de toute façon, il n’a pas fait long feu. Après une longue discussion sur son comportement avec Evelyn, elle a perdu l’enfant. Une fausse couche qu’elle a porté seul, en prenant conseil auprès de médecin qui ne connaissait pas la famille. Elle s’est encore plus renfermée. Son frère devenant la seule personne de la famille qui ne recevait pas d’insultes ou de paroles désintéressés. Ses parents ont cru à un problème lié au lycée et à des souvenirs trop grave. Ils n’avaient pas tout à fait tort mais ils n’ont jamais trouvé la vérité.
La haine
La vérité, c’est inatteignable. On ne peut être sûre de rien. Encore moins de phénomène dont il ne reste plus aucuns témoins. Selon la police, son père vivait une folle aventure extra-conjugal avec l’une de ses collègues de boulot. Les deux ayant tué leur conjoint, après une communication téléphonique, avant de se donner la mort. Elle n’a rien vu, Evelyn non plus. C’est Zack le premier a être rentré. Et il a préféré protéger les filles en les empêchant de rentrer à l’intérieur. Le grand frère protecteur qui prend le rôle du père quand les parents sont partie. Il a gérer la plupart de la paperasse, cherchant un job à côté des études pour pouvoir garder la maison. Ils ont tous cherché un job. Mais Roxanne, avec les années ne supportait pas mieux Evelyne. C’est depuis qu’elle vit avec eux que tout part en vrille. Elle est arrivée et un peu après, il y a eu la fusillade et tout ce qui en a découlé. Le facteur commun à toutes les morts, c’est elle. C’est sa faute tout ça. Elle apporte la mort partout où elle va. Non ! C’est elle la mort. Elle est mariée avec au moins. Ça a été la meilleure coupable car il en fallait bien une. C’était elle. Et si elle se rapprochait un peu plus de son frère, quitte à demander des soirées à deux, elles se disputaient un peu plus avec sa concurrente, n’hésitant pas à l’appeler la faucheuse quand les mots étaient criés. Mais si elle a investi une partie de sa haine et de sa colère dans la fille à l’allure de mort. Elle a investi une autre partie dans le travail et les études. Sortant rarement la tête des cahiers, si ce n’est pour sortir faire la fête et passer la fin de soirée accompagné d’un homme. Et ça a payer, elle a enfin fini ses études et s’est faite embaucher au journal depuis quelques mois. Les événements surnaturels étant les sujets sur lesquels il est plus passionnant de parler, bien qu’elle n’en a pas fait une spécialités. Les petits meurtres en tout genre sont tout aussi passionnants. Aux plus c’est sombre et inimaginable, au plus c’est tentant et vendeur. L’esprit humain est plus pervers qu’elle ne pourra jamais le comprendre.